L’Ecole Dehors a investi le Jardin des Deux-Nèthes

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Depuis le début de l’année, sous l’impulsion d’Alexandre Ribeaud, l’Ecole Dehors est présente les lundis, mardis et jeudis dans le Jardin des Deux-Nèthes. Convaincu de ses bienfaits pour la santé et l’apprentissage des enfants, ce professeur des Ecoles devenu chargé de mission  accueille les enseignants intéressés par la formule mais qui ont besoin d’aide et de conseils avant de se lancer. Aujourd’hui, le succès est là et Alexandre Ribeaud a du mal à répondre à toutes les demandes.

 

Nous avons découvert le concept de Classe Dehors lors d’une réunion publique organisée par la mairie du XVIIIe. Le débat avait été vif car le lieu choisi – le jardin des Deux-Nèthes – était occupé par « un jardin partagé » qui devait libérer la place. Les animateurs du jardin, même s’ils reconnaissaient la pertinence de l’action, ont eu du mal à s’incliner. Huit mois après, le bilan est très positif pour les enfants et les enseignants comme nous l’a confirmé Alexandre Ribeaud lors d’un entretien.

 

Pouvez-vous vous présenter et nous expliquer comment vous en êtes venu à promouvoir l’Ecole en plein air ?

J’ai 52 ans depuis peu et je suis professeur des Ecoles depuis quatorze ans. C’est le fruit d’une reconversion professionnelle. Auparavant, je travaillais dans la communication digitale et la création de sites Internet. En 2014, alors que j’étais en charge d’une classe maternelle, j’ai commencé à instituer une demi journée de classe dans un square à la Villette. J’avais découvert dans des livres cette pratique qui est développée dans plusieurs pays comparables au nôtre et j’avais été frappé des résultats engrangés sur la santé des enfants mais aussi sur les apprentissages – et pas seulement ceux liés à la nature. Même si pour ces enfants citadins, le premier bénéfice est leur reconnexion avec la nature.

Je me suis passionné pour le sujet et je suis devenu un ardent défenseur de cette pratique. J’ai proposé à la mairie de Paris d’accompagner les enseignants qui étaient tentés mais qui avaient peur de se lancer. Je suis ainsi devenu chargé de mission Classe Dehors et j’accueille, en général pour trois journées, des classes et leurs professeurs qui découvrent avec moi que ce n’est pas si compliqué de faire vivre cette formule.

 

Quel est le principe de l’Ecole en plein air et à quels niveaux peut-elle être pratiquée ?

C’est très simple : il s’agit de faire la classe dehors. Selon les enseignants, il existe plusieurs pratiques. Il y a ceux qui, en charge d’une classe maternelle, laissent simplement les enfants jouer librement. Le jeu libre, intégré dans les programmes de maternelle, est une source de nombreux apprentissages. Il y a ceux qui les reconnectent à la nature en étudiant les végétaux, les êtres vivants de ce milieu, le chant des oiseaux, etc.

Enfin, les enseignants qui l’ont testé se sont rendu compte que cela pouvait convenir à toutes sortes d’apprentissages comme les mathématiques ou l’acquisition du langage. Dans un cadre différent plus apaisé, avec plus de place, avec une grande liberté de mouvement, des élèves qui ont du mal à exprimer leur potentiel dans le cadre de la classe traditionnelle sont plus à l’aise dehors. Après une période d’adaptation, on remarque que tous les enfants prennent possession de ce nouveau cadre et en apprécient les multiples facettes.

Je me suis plus intéressé au premier degré mais des classes dehors ont lieu avec des collégiens ou des lycéens. Je connais des professeurs qui s’installent dehors pour faire cours, pour des révisions ou des contrôles.

 

Y a t’il une saisonnalité pour pratiquer l’Ecole dehors ?

Aucune. Et la régularité est l’une des clés du succès : on met en place cette activité toutes les semaines de l’année. Nous faisons donc classe dehors quel que soit le temps. Les enfants sont beaucoup moins sensibles à la météo que les adultes. Bien couverts quand il fait plus froid, avec un imperméable et des bottes quand il pleut, les enfants affrontent tous les types de temps. Et, quand il pleut – ce qui n’est finalement pas si fréquent à Paris, à l’exception de cette dernière période – c’est souvent là que l’on fait les meilleures séances : les enfants sont ravis de se lancer dans de glissades, de sauter dans des flaques…

 

Comment se passe une séance, une demi journée ou une journée dehors ?

L’enseignant bâtit ses séances d’apprentissage comme il le ferait dans sa classe. Mais en s’adaptant à ce nouveau milieu. On apporte d’abord ce qu’il y a dans la classe. Tel professeur qui a mis en place une activité de jeu à la marchande va apporter la première fois des étiquettes et ses faux billets. La deuxième fois, il prendra peut-être des feuilles ou des marrons pour faire la même activité en utilisant ce que la nature met à notre disposition.

Il s’agit aussi de laisser les enfants découvrir le milieu par eux-mêmes. La découverte de vers de terre ou d’insectes peut mobiliser leur attention et les laisser concentrés pour une demi heure entière… Evidemment, durant la première séance, la nouveauté entraîne une perte de concentration. Mais cette période passe très vite et on se rend compte que les capacités de concentration sont ensuite très souvent meilleures que dans la classe. Y compris pour les apprentissages fondamentaux.

 

Pourquoi avoir choisi le jardin des Deux-Nèthes ?

Je cherchais un endroit dans le XVIIIe et je me suis adressé à la mairie. Qui m’a proposé deux lieux. Le jardin des Deux-Nèthes est situé dans un endroit calme, loin de la rue. Il y a du relief et des arbres de très grande taille. Il y a un espace un peu sauvage. Il a fallu gérer le problème avec les animateurs du jardin partagé mais il était dans une telle déshérence… Après huit mois, je pense que nous faisons partie du paysage et que le lieu a retrouvé une fréquentation positive. Je l’occupe les lundis, mardis et jeudis mais je sais que d’autres classes ont demandé à en bénéficier les mercredis et vendredis.

 

Combien de classes et d’enfants avez-vous accueilli ? Et d’où viennent-elles ?

Entre le 15 janvier 2024 et le 7 juillet, 30 classes et leurs professeurs sont venus pour au minimum 3 demi-journées. 30 enseignants ont été formés et je sais que 191 enseignants pratiquent aujourd’hui la classe dehors de façon régulière.

J’ai beaucoup plus de demandes que je ne peux accueillir de classes. J’ai en ce moment 135 demandes que je ne peux pas toutes satisfaire car l’année scolaire compte 36 semaines…

Les classes que je reçois viennent de tout Paris mais une majorité provient des arrondissements voisins.

 

Quels sont les bénéfices pour les enfants individuellement et pour les classes collectivement ?

Ils sont de quatre ordres :

• Effets sur la santé. Etre plus longtemps en plein air a des effets positifs.

• Effets psychologiques. Les enfants sont confrontés à un autre environnement et ceux qui sont le moins à l’aise dans la classe sont souvent les plus à l’aise dehors. Ceux qui sont en situation d’échec montrent d’autres capacités et gagnent en confiance en eux.

• Effets sur le groupe, effet social. L’activité pratiquée dans des conditions parfois difficiles (pluie, froid) soude le groupe et fédère la classe.

• Effets sur les apprentissages. L’effet sur le langage a quelquefois des allures de miracle. Tel enfant qui ne s’exprime jamais peut raconter longuement comment il a trouvé un bâton et ce qu’il a fait avec. Les activités que l’on fait en situation réelle sont plus facilement assimilées : on retient mieux le concept de à côté, dessous, devant autour d’un arbre qu’en collant des gommettes dans un cahier !  Sans compter avec les mathématiques tout ce qui est mesurer, ajouter, etc.

 

Avez-vous une anecdote à nous raconter ?

Il y en aurait des dizaines mais en voici une. J’ai installé dans le jardin des pavés en rond pour faire asseoir les enfants et avoir un moment d’échange collectif. L’un d’eux a soulevé son pavé et a trouvé un vers de terre en dessous. Aussitôt, tous les enfants ont soulevé le leur et c’en était fini de ce beau cercle que j’avais constitué…

Propos recueillis par Ignace Manca

Date de publication : 
4 décembre 2024