L’avenue de Clichy n’a pas toujours été celle que l’on connaît. Les beaux immeubles qui la bordent sont les témoins d’une époque faste où ouvriers et bourgeois, politiques et artistes se pressent pour fréquenter quantité de lieux prestigieux ou bon marché, loin de l’agitation du centre de Paris.
Comment le Guide Bleu Paris 2002 présente-t-il l’avenue de Clichy ? « Une avenue ombragée et commerçante, recherchée par les peintres de l’entre deux guerres ». Et le Guide du Routard 2002 ? « L’avenue de Clichy, ex-Grande Rue des Batignolles n’a rien conservé de son passé provincial. Elle serait plutôt cosmopolite. Et pourtant […] ce fut un endroit bien paisible, une sorte de Saint-Germain-des-Prés ou de Montparnasse fréquenté par les artistes... »
Provinciale l’avenue de Clichy ?
Le Figaro du 5 janvier 1837 ironise mais donne un bel aperçu de ce que représentait l’avenue dans l’imaginaire des Parisiens : « Un écrivain avantageusement inconnu, s’imaginait voyageur pour son œuvre et jugeait pourtant qu’il était inutile de se déranger. Mais par conscience et fidélité il quitta sa mansarde de la rue Mouffetard et prit l’omnibus qui l’emmena au-delà des boulevards extérieurs. Près du Jardin des Plantes, il embarqua dans la Batignollaise et traversa alors Paris en savant et en poète... et fila jusqu’aux barrières » , c’est-à-dire les Batignolles. La province ?
Bien que rattaché à la capitale depuis 1860, le village des Batignolles reste, avant la Première Guerre mondiale, un petit bout de campagne. C’est là que l’on file le dimanche, loin des regards, de la foule, du bruit, des convenances, des contraintes de la société parisienne pour une journée de campagne afin de déguster, dans le jardin d’une guinguette un petit vin blanc pas cher.
Une sorte de Saint Germain des Prés ou de Montparnasse
Les artistes, les peintres surtout, dans la seconde moitié du XIXe siècle, ont bien saisi l’intérêt de s’installer dans des lieux si tranquilles et agrestes, d’ombre et de lumière. Ainsi, le peintre Bazille loue-t-il une grande maison et un vaste atelier rue La Condamine dont il fait profiter ses amis, Claude Monet, Edouard Manet, Auguste Renoir, Edgard Degas. Il écrit à sa mère : « Les Batignolles sont un quartier tranquille où l’on dépense moins d’argent qu’à l’intérieur de Paris... » Avant 1914, peintres, dessinateurs, écrivains, hommes politiques se rencontrent souvent avenue de Clichy. C’est facile. Il y a des restaurants de bonne gastronomie, des bouillons bon marché des limonadiers, des salles de billard, des cafés-concerts qui ne demandent qu’à les accueillir.
• La Taverne de Paris, 3 avenue de Clichy est inaugurée le 21 octobre 1905, en présence d’un grand nombre de peintres et de dessinateurs : Forain, Hansi, Poulbot, Willette, Steinlen. Le bâtiment a été dessiné par Jacques Hermant, également architecte de la Galerie des Champs Elysées (1904) et de la salle Gaveau (1905). Presque tous les murs sont marquetés et décorés de fresques et de peintures de Chéret, Faivre, Léandre, Grün, Métivet, Steinlen, Willette.
• Le Restaurant Boivin, 6 avenue de Clichy. Implanté en face, fondé en 1815, il est refait complètement en 1879. On a pu lire que ce restaurant était réputé pour ses parties fines et la présence de dames du demi monde. On retiendra plutôt ses nombreux banquets :
- le banquet donné en 1869 en l’honneur du douzième anniversaire de la fondation de la Société de Prévoyance des artisans menuisiers – Prix : Hommes : 5,75 F, Femmes : 5F, Enfants de moins de 10 ans : 3 F,
- le banquet fraternel du Cercle Républicain d’Indre et Loire organisé le 24 février 1885 (journal Le Radical, 21 février 1885),
- le banquet trimestriel de Lou Peiroou, (journal de la Société Amicale des Enfants du Var),
- les banquets de l’association des Anciens Elèves de l’Ecole Polonaise de la rue Lamandé,
et bien d’autres réunions politiques, syndicales et confraternelles.
• Le Cabaret du Père Lathuille, 7 avenue de Clichy. Jean François Lathuille, fermier et éleveur, ouvre, vers 1769, une auberge sur les terres de la ferme qu’il possède au carrefour de l’avenue de Clichy et de la rue des Dames. Son fils, Pierre Lathuille (1763-1816), également marchand de vin en fait un grand cabaret de gibelotte de lapin et de matelote d’anguille. Ce cabaret gagne encore en célébrité en 1814 quand le général Moncey y établit son poste de commandement pour la défense de Paris (29-30 mars 1814). Le tableau d’Horace Vernet immortalisera le haut fait d’armes de l’aubergiste haranguant les soldats par ces paroles viriles : « Buvez et mangez, videz mes caves, il ne faut rien laisser à l’ennemi. »
Pendant tout le XIXe siècle le Cabaret du Père Lathuille acquiert la réputation d’un grand restaurant parisien, connu pour sa fine gastronomie. Mais on n’y vient pas uniquement pour la sole Moncey ou le poulet grillé. On y retrouve la province, on jouit de la fraîcheur des tonnelles, des recoins du jardin, et on va se cacher dans de discrets cabinets particuliers.
Le Tout-Paris aime à s’y retrouver. Le baron James de Rotschild fait déguster à ses amis un fameux madère. S’y rencontrent les écrivains – Mallarmé, Catulle-Mendes, les Dumas père et fils, Zola – les sculpteurs et les peintres – Henner, Jérôme, Bartholdi, Forain, Degas, Rodin, Steinlen, Monet, Manet qui peint en 1879 « Chez le Père Lathuille », des musiciens – Victor Massé, Saint Saens – et les grands hommes politiques de la troisième République : Gambetta, Clémenceau, Jules Ferry, Waldeck Rousseau.
Le journal le Gaulois du 22 janvier 1906, annonce la fermeture du Père Lathuille déplorant que « […] depuis des années, Paris se transforme. Après l’établissement du Père Lunette, c’est celui du Père Lathuille que l’on jette à bas. La vogue avait cessé […] » On le remplace par un vaste caravansérail : le Bouillon Pascal et une salle de café concert le Kursaal où l’on présente des séances de cinéma organisées par des opérateurs de spectacle dont les frères Mélies. C’est un échec, la maison se transforme en cabaret qui connaît une notoriété passagère quand s’y produisent Ouvrard, Maurice Chevalier, Fréhel, Berthe Sylva. En 1928, repris par les descendants de Lathuille, le Kursaal devient l’Eden, un cabaret, puis en 1937 Les Mirages, un cinéma racheté par Pathé qui en fera un complexe multisalles repris en 1996, par la Société Civile des Auteurs Réalisateurs (ARP). Ce sera le Cinéma des Cinéastes.
Juste en face, au Père Lathuille, on pouvait aller Chez Clément. On n’y mangeait peut-être pas aussi bien, mais c’était moins cher.
• Restaurant Vantier, 8 avenue de Clichy. Encore un restaurant de qualité avec un jardin. On y célèbre des mariages par un bon repas, par exemple celui du 14 février 1910. Une noce chez des petits bourgeois.
Il y a bien plus sérieux que les banquets de noce ; les banquets littéraires, les banquets de syndicats patronaux, les banquets de bienfaisance et les banquets politiques.
Les banquets de la Plume, une revue littéraire, rassemblent poètes symbolistes et Parnassiens.
On ne compte pas les banquets de bienfaisance tel le banquet concert des employés de Commerce, le banquet de la fête de bienfaisance organisé par la Chambre Syndicale Ouvrière des Pâtissiers de la Seine. Plus politique, celui du 11 juin 1898, présidé par Henri Rochefort qui lance la campagne du parti républicain socialiste français avec Ernest Roche au comité central socialiste révolutionnaire.
A partir de 1912 le Restaurant Vantier prend le nom de Restaurant Ratinaud qui maintient la tradition du banquet. Le 5 avril 1912, on commémore les Martyrs de la Libre Pensée, le banquet du Journal des Bretons de Paris, avec concert et danses bretonnes le 1er Juin 1912, etc.
• Le Cafe Guerbois, 9 avenue de Clichy. Vers 1830, le gendre de Lathuille ouvre, comme une annexe luxueuse au restaurant, la Succursale. On peut directement passer d’un établissement à l’autre. Auguste Guerbois lui succède à la gestion de ce café. Duranty, le romancier réaliste proche des Impressionnistes évoque ce grand café : « [...] Il est curieux et agréable [...] fondé en pleine banlieue jadis, il a conservé en partie son ancien aspect de province […] Ainsi, la première salle, blanche et dorée, pleine de glaces, criblée de lumières, ressemble à la terrasse des cafés du boulevard […] dans la seconde salle l’endroit devient étonnant. A l’entrée, six colonnes trapues forment une avenue qui la divise en deux espèces de chapelles rétrécies, derrière lesquelles s’étend au fond, comme un chœur, un champ de billards. Des vitrages irrégulièrement ouverts dans le plafond […] créent partout des recoins mystérieusement éclairés. Il n’y a ni glace ni dorures […] Au fond, un grand vitrage qui garnit toute la largeur de la salle fait voir en pleine clarté un jardin avec des arbres, entre lesquels apparaît une maisonnette à galerie, à petites colonnes peintes en vert tendre. »
Ce café apparaissait « comme un café hospitalier et doux où se réunissaient les artistes habitant le village des Batignolles... Les habitués y étaient assidus plus que partout ailleurs. D’autres cafés, dans l’avenue, recueillaient les buveurs de passage, les soiffards […] au Guerbois, ne venaient que les gens du quartier, surtout ces messieurs les peintres, qu’un vieil amateur M. de Beauchêne, égaré, nomma, le premier, ces Messieurs de l’Ecole des Batignolles. »
Edouard Manet fréquente très tôt le café quand il habite boulevard des Batignolles. Endroit d’autant plus pratique que la maison Hennequin qui fournissait le matériel de peinture était installée au 11 avenue de Clichy. A côté.
De 1863 à 1873, Le café Guerbois est incontournable pour tout ce que Paris compte d’artistes, de peintres, d’écrivains, d’amateurs d’art, de poètes, de journalistes. C’est dans la deuxième salle, à l’abri du tintamarre de l’avenue que la révolution impressionniste prend forme, voulue par Henri Fantin-Latour, Edgar Degas, Claude Monet, Edouard Manet, Alfred Sisley, Cézanne, Pissaro – malgré la conduite régulièrement scandaleuse de Verlaine et de Rimbaud. Ce café inspire Manet qui en fait le cadre de son buveur « Le bon bock » et Degas pour « l’Absinthe ».
Tripes à la mode de Caen Jouanne Aîné
Barrière de Clichi à Batignolles Monceau n°12 Ci devant rue des Provaires
Accommode les tripes à la façon de Caen. On en trouve tous les jours depuis 8 heures le matin. On peut les manger chez lui ou en ville. Il tient aussi le véritable cidre de Normandie.
Les tripes ont la réputation d’être fameuses. En 1854, un journaliste du Figaro écrit un article sur la manière dont elles doivent être servies : dans le restaurant à deux étages, toujours enfumé, on apporte les tripes qui doivent être mangées bouillantes servies sur un réchaud de braises. Dans l’Assommoir, les convives de Gervaise, qui voit les choses en grand, sont conviés à manger des tripes à la mode de Caen que l’on sert sur un réchaud, Grande rue des Batignolles.
• Le Grand Bouillon - Restaurant Bal du Chalet, 43-45 avenue de Clichy et 2 rue Hélène. En 1886, à partir d’un ancien petit restaurant de la rue Hélène, une salle de bal, un bouillon et une salle de billard sont ouverts avenue de Clichy. Toulouse-Lautrec, Vincent Van Gogh, Seurat, Signac, Emile Bernard viennent y dîner. C’est sur une des serviettes de ce restaurant que Van Gogh fait le portrait du père Tanguy, son marchand de peintures. En 1887, il y organise l’exposition des Impressionnistes du petit boulevard. Van Gogh y fait accrocher les Tournesols que personne n’achètera. La maison organise aussi de grandes fêtes charitables telle celle au profit de l’œuvre des loyers du XVIIe arrondissement. Le Grand Bouillon disparaîtra en 1889.
Cosmopolite, l’avenue de Clichy ?
Les grands restaurants, les bouillons galerie d’art, les cafés d’artistes, les cabarets russes de snobs et de mondains ont conféré du prestige à l’avenue de Clichy. Mais, lorsqu’on consulte l’annuaire du commerce Didot Bottin de 1921, on constate des signes de changement.
La Taverne de Paris a été reprise par un groupe de restauration. C’est un simple restaurant qui remplace le restaurant Boivin. Le Père Lathuille est devenu le Kursaal salle à la façade racoleuse qui offre des spectacles souvent médiocres. Le restaurant Vantier est devenu le cinéma Métropole-cinéma select pictures (location de films). La brasserie Muller & Blaisot a succédé depuis longtemps à l’ancien café Guerbois. Elle lui doit sa renommée au tableau de Degas l’Absinthe qui a peint le graveur Marcellin Desboutin en compagnie de son amie Ellen André, assommés par l’absinthe. La si célèbre brasserie Jouanne est alors l’établissement Pigault Fils qui « fait commerce de tripes », enfin, le Grand Bouillon laisse place à la Société Française des Nouvelles Galeries Réunies.
Les grands repas sont passés de mode, entraînant la disparition des grandes maisons. Elles ne correspondent plus aux fonctions qu’on leur assignait, ce ne sont plus les lieux de visibilité d’une revendication de pensée politique, syndicale ou d’un statut social. Au Boivin, au Vantier, on célébrait les institutions de la Troisième République : le parti politique, le syndicat patronal ou non, l’association de secours mutuel ou de bienfaisance. Elles valaient bien un décor d’apparat.
Place au désenchantement
Après la Première Guerre mondiale, la foi dans les vertus de la République laisse place au désenchantement. Les institutions du régime républicain, les idées politiques ne se défendent plus autour d’un gigot ou d’une tête de veau arrosés de Morgon rouge. La chaude atmosphère des banquets s’est dissipée dans l’euphorie de la victoire et la douleur des deuils. C’est le temps des grandes manifestations propices à la communion nationale et à l’exaltation collective du mouvement, de l’énergie, de la force vitale, de la violence à l’instar de ce qui se passe en Italie et en Allemagne. En 1931, les Français se précipitent à l’Exposition coloniale, en 1937 à l’Exposition universelle où on peut, pour 8,50 F, déguster une choucroute sur la terrasse du pavillon du Japon.
Encore plus sensible était le souci de rendre visible le statut social : à grand mariage, grand repas, à bel enterrement, belle réception. Et si, comme Gervaise pour ses noces (l’Assommoir de Zola), on veut mettre les petits plats dans les grands, on a de plus petits moyens, on va en cortège, manger des tripes.
A cette même époque, l’avenue de Clichy est une avenue active, populeuse, passante, mais elle ne convient plus au désir de représentation, de bourgeoisie des classes moyennes parisiennes. Il faut dire que le Bal du Jardin, au 26 de l’avenue, le bal de l’Ange Bleu dans l’impasse des Deux-Nèthes ne la valorisent pas. Ce sont des mauvais lieux. Des constructions en planches, pas facilement accessibles, donnent accès à un tripot tenu par des voyous. La salle de bal était un endroit glauque et enfumé. Ouvriers et employés modestes venaient y danser sur du Musette. En réalité, c’est un repère de truands. Papillon, malfrat, évadé du bagne, parlait de ce dancing comme d’un paradis perdu. Les « caves » n’y avaient pas leur place.
Alors, les bourgeois en noces qui, autrefois, allaient au petit village des Batignolles préfèrent le bon air des bords de Marne ou les salles perchées dans les grands arbres de Robinson.
Le départ des artistes de l’école des Batignolles a aussi accéléré l’effacement du prestige de l’avenue. Ils n’en supportent pas le vacarme. Célèbres et âgés, ils sont partis pour une vraie campagne, en Normandie ou sur la Côte d’Azur. Et, quand Paris accueille des artistes venus du monde entier, Picasso, Modigliani, Foujita, Zadkine, Kisling, Soutine, Chagall, c’est à Montparnasse que se constitue l’école de Paris entre Rotonde et Coupole, Select et Closerie des Lilas.
Fournisseur de l’élysée
Pourtant, dans les années 1970 encore, si on consulte l’annuaire téléphonique des PTT, on constate que l’on peut s’habiller beau et manger bien. Le long de l’avenue, au 6 : Valentin, Roi de l’imperméable, au 7 : les Pipes Guyot, au 12 ter : Librairie de l’Avenue, au 13 : Paris Voyage Maroquinerie, au 19 : le Roi du Bouton, au 20 : La Pâtisserie - Traiteur Cochet, au 22 : Etam Lingerie, au 23 : Pronuptia, spécialiste du mariage, au 36 : Vely – Foie gras, Truffes, Réceptions à domicile, fournisseur de l’Elysée. De cette belle crèmerie 1900, on peut encore apercevoir le plafond en verre peint dans un bazar qui ne va pas fort.
Et, en ce début du XXIe siècle, la Taverne de Paris, au 3, est remplacée par des locaux de la compagnie d’assurances Groupama. Là où était installé le restaurant Boivin on trouve aujourd’hui l’ancienne boutique de téléphonie Orange fermée de puis quelque temps. Reprise par le cinéma Wepler, elle attend une nouvelle vie. Le cabaret du Père Lathuille, c’est maintenant le Cinéma des Cinéastes qui montre les quelques restes du fameux restaurant.
Le Vantier est remplacé par le cinéma Wepler ; à la place du café Guerbois on trouve le magasin de vêtements Celio. Du restaurant Jouanne, il ne reste que la superbe façade ornée de son bacon de fer et de verre en étage avec, au rez-de-chaussée, un serrurier, un magasin de dératisation et un opticien. A la place du Kasbek, si snob, dit-on, Camaïeu et enfin, c’est Monoprix qui a pris la place du Grand Bouillon – Bal du Châlet.
Ne mangerait-on plus dans cette partie de l’avenue de Clichy ? Mais si ! On trouve 5 kebabs, un restaurant pakistanais et un traiteur chinois. Peut-on alors parler de cosmopolitisme ? Plutôt d’une uniformité communautaire. On dit que l’ennui naquit de l’uniformité, c’est peut être pour cela que cette partie de l’avenue est jugée triste et ennuyeuse par les riverains.
Des cafés ? Pas de grand café, pas vraiment de terrasses. Le café PMU serait-il le dernier type de lieu de rencontre de l’endroit ? La circulation, le vacarme de l’avenue ont assassiné ces lieux traditionnels de rencontre.
La convergence de plusieurs facteurs explique l’effacement du côté provincial de cette partie de l’avenue. Elle devait son éclat aux visites des riches Parisiens du centre vers les faubourgs de la périphérie, les anciens villages. De nos jours, le mouvement est inversé, du fait de la prolongation des lignes de métro M13. Avenue de Clichy, on recherche les produits bon marché proposés par les bazars, les magasins de vêtements et de valises pour le voyage au pays, des boutiques de change pour envoyer l’argent à la famille et des échoppes de téléphonie. Et une restauration communautaire. Ceci en dépit de l’évidente gentryfication du quartier dont les habitants ne se retrouvent pas dans cette avenue.
La circulation automobile, la pollution, les embouteillages aux heures de pointe ont eu raison de la flânerie aux terrasses de café et des promenades après repas.
Pourtant, on peut s’y sentir bien quand on s’en extrait pour aller au cinéma. Les nombreuses salles en font un lieu culturel reconnu et recherché et qui a de beaux jours devant lui.
Ismérie Ducroquet