Crise économique, déclin du commerce indépendant, spéculation immobilière, mono-activité commerciale, dictature de la bagnole, inertie des services publics : ainsi s’est brisée l’attractivité d’une avenue « commerçante ». Ils l’ont écrit, ils se sont engagés, et pourtant...
D’un abondant florilège d’engagements non tenus, citons ces quelques exemples.
Dans le journal Espoir 18 n° 52, décembre 1987 : « Non aux étalages sauvages ! La réglementation doit être respectée. Tout ce qui touche à l’environnement des habitants du 18e, Alain Juppé y est sensible. Ainsi récemment, il a effectué une inspection des points sensibles, en compagnie des responsables de la voirie de la Ville de Paris et de Claude Debrion, pre- mier adjoint au maire du 18e et chargé de mission au RPR pour le XVIIIe...». Alain Juppé était, en 1987, député de Paris (18e circ.), conseiller de Paris (XVIIIe) et adjoint aux Finances du Maire de Paris.
Et pourtant les plus envahissants des étalages sauvages de fripes, avenue de Clichy, n’ont été rentrés qu’en 1998 ! Il fallut pour cela une réunion publique organisée par déCLIC 17/18, en présence du député des Grandes Carrières-Montmartre et du commissaire central R. Maucourant.
Du même Alain Juppé, une lettre du 21/11/1985 évoquant la dégradation de l’avenue de Clichy : « J’ajoute que le maire du XVIIe arrdt souhaite mettre en place un groupe de travail qui étudierait les moyens à mettre en œuvre pour remédier à la dégradation de l’environnement de l’avenue de Clichy. Je suis tout à fait favorable à ce groupe de travail et je pense qu’il pourra se réunir très prochainement (...) ».
Eh bien, nous y voilà, puisqu’en mars dernier s’est tenue la première réunion d’une commission de travail sur ce thème à la mairie du XVIIe. Ce ne fut qu’une courte attente d’un peu plus de 18 ans !
De Jean Tibéri, maire de Paris, dans un courrier à déCLIC 17/18 (29/05/97) : « Vous avez bien voulu m’exposer les objectifs de votre association tenant à la remise en valeur de l’avenue de Clichy. (...) Vous souhaitez que la municipalité engage une action d’amélioration du cadre de vie à l’image de ce qui a été entrepris pour revaloriser les Grands Boulevards. (...) Très attentif à vos préoccupations, j’ai demandé à Mme N., sous-directeur à la DAUC, de vous proposer très prochainement un rendez-vous (...). Je souhaite vivement que cette rencontre marque l’engagement d’une collaboration fructueuse entre votre association et les services municipaux. »
Aucune nouvelle malgré, à l’époque, nos appels téléphoniques et nos courriers de relance ... Sept ans plus tard, peut-être ?
2003 consacrée à la réhabilitation de l’avenue de Clichy, le président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris a proposé une explication plutôt originale : « Dans le nord-est de Paris (!) la paupérisation de la population entraîne logiquement une paupérisation des commerces ».
Pourtant, se loger aux Batignolles n’est pas à la portée de toutes les bourses
Le nœud gordien reste l’énorme conflit d’intérêts économiques entre Paris intra-muros et sa proche banlieue. D’une part, les hypermarchés interdits intra-muros (à deux exceptions près) s’imposérent aux portes de Paris dans des communes limitrophes sinistrées par la disparition de leur industrie. D’autre part, recréer en banlieue un tissu commercial solide, s’il accroît une concurrence féroce avec les arrondissements périphériques parisiens, répond aux besoins légitimes de villes en pleine mutation (cf. les hypermarchés de Clichy et Levallois). Plus récemment, le projet de création d’un centre commercial à Aubervilliers, non loin de la Porte, sur d’anciennes friches industrielles, a inquiété des associations de commercants des Portes de Paris.
Même si, sous l’effet de l’action conjuguée des associations hostiles et d’élus parisiens concernés, ce projet, à la lisière des 18e et 19e arrondissements, a dûévoluer et revoir à la baisse l’étendue de ses surfaces commerciales, nul ne peut refuser à des villes limitrophes de se doter de nouveaux moyens de leur dévelopemment économique. Ici, comme sur bien d’autres sujets, la solution réside dans un dialogue responsable entre Paris et les communes de sa proche banlieue.